Paris, le 19.02.2014,
A droit constant, nous sommes déjà perdants, et depuis 1977. L’architecture reconnue d’utilité publique, nous avons revendiqué et accepté d’en assumer la charge. Cependant, l’existence du seuil a créé dès le départ l’incompréhension, la méfiance et le désamour. Les français moyens, nos clients (ceux pour lesquels le seuil en CMI a un impact), n’aiment pas l’injustice et le corporatisme. Ils nous le prouvent à en juger le nombre des passages de permis sous la barre des 170m² ! De ce point de vue, en tant qu’architecte, je ressemble de plus en plus à un radar automatique.
Pour le quidam-particulier-client potentiel toute démarche concernant le seuil sera jugée corporatiste et injuste. Aucun élu ne pourra l’assumer.
Qu’il est dur de faire naître le désir d’architecture (et d’architecte) dans ces conditions ! Tous les arguments techniques, financiers, esthétiques, etc… seront biaisés.
Le mal est fait, et le terrain perdu au propre comme au défiguré.
Nous ne trouverons jamais un élu, en capacité de faire bouger les choses pour pérenniser notre profession ou plutôt la sortir de sa paupérisation, because les solutions sont connues :
– Retour à la loi de 77 qui fonde notre action et justifie notre existence, soit un PC = un archi.
– Retour au barème de rémunération minimale, dans le public, dans le privé, calqué sur la MIQC(P).
J’en rajoute une : un bâtiment = un coach architecte, installé dans la durée, seul généraliste, suffisamment technicien et surtout assermenté, saura trouver la bonne porte de sortie (PMR / RT / mises en conformités diverses / traitement d’ensemble / cadre de vie).
Avec lucidité, j’affirme qu’en dehors de cela, nos revendications sont autant de sparadraps sur un corps professionnel dont il faut accompagner la mutation non la dégénérescence.
Le monde est plus dur, il nous faut donc l’être aussi, et je ne vois qu’une seule action, non coûteuse, bien plus pédagogique et efficace à entreprendre plutôt que nos bagarres microcosmiques :
Les architectes retournent leur carte professionnelle à l’Ordre ou à leur syndicat préféré lesquels devront les envoyer par paquets de 1000 au premier ministre.
Chacun pourra en profiter pour énoncer les raisons de leur geste, ou pas, et rappeler ce que les autres (pavillonneurs, syndics, ou intervenants ponctuels de la construction, anciens ou nouveaux) ne feront jamais à leur place. Les exemples ne manquent pas :
– Construire une extension de 20m² pour permettre à un couple retraité de continuer à vivre dans son pavillon démuni de sanitaires en RDC ;
– Expliquer non sans difficultés, le danger que pouvait constituer le rachat de Certificat d’Économie d’Énergie à un Maire prêt à céder à un prestataire qui lui proposait des travaux en dépit de toute règle de mise en concurrence, au motif malhonnête qu’un marché de travaux ramené à 0€ n’était pas soumis au Code des Marchés Publics ;
– Proposer une vision pluriannuelle à un donneur d’ordre par trop gestionnaire ;
– Assister un couple de particulier dans le cadre d’un marché de travaux non respecté ;
– Alerter un syndic sur la non-conformité en matière de sécurité incendie concernant des travaux d’entretien / maintenance visant la ventilation de caves ;
– Etc.…
Chacun pourra en profiter pour rappeler le traitement architectural, supplément d’âme, qu’il a pu apporter à telle ou telle opération (que deviendrait le cadre de vie ?).
Chacun pourra en profiter pour rappeler les entraves réglementaires bien concrètes qu’ils ont rencontrées et qui les ont empêchés de faire aboutir telle ou telle opération (des solutions pour lacroissance…) ;
Chacun pourra en profiter pour indiquer combien de fois la conclusion des clients que nous n’avons pas eu a été celle de réaliser leur projet sans demander quoi que ce soit (sans moyens pour exercer, aucune utilité).
Et que pour ces raisons, il y a lieu de dissoudre l’Ordre des Architectes que l’on maintient (sous perfusion) pour se donner bonne figure, mascarade à laquelle les expéditeurs de cartes ne voudront plus participer.
N.B. : le retour de la carte n’est pas une grève des permis, on peut continuer à turbiner mais le malaise aura été mis à jour, par voie de presse si possible.
Bises et coup de coude confraternels.
Archimad.