Dominique Errard | 02/07/2012 | 16:18 | LE MONITEUR profession
Insatisfait de la réforme de la surface de plancher entrée en vigueur le 1er mars dernier, le président de l’Ordre des architectes a demandé à Aurélie Filippetti, ministre de la Culture, l’abaissement du seuil de dérogation au recours obligatoire à l’architecte.
On sait les architectes inquiets. Conjoncture en berne, réduction du recours obligatoire à l’architecte dû à la création de la surface de plancher, éclatement dans différents ministères des politiques intéressant l’architecture (Culture, Ecologie, Logement…)… figurent en bonne place de leurs préoccupations. C’est ce que Lionel Carli, président de l’Ordre des architectes a dit à Aurélie Filippetti, ministre de la Culture, tutelle des architectes, lors d’un rendez-vous qui s’est tenu au ministère le 27 juin. L’architecte élu n’a pas manqué de demander l’abrogation du décret modificatif sur la surface de plancher qu’il avait qualifié de « scélérat » lors de sa parution, le 8 mai, veille de la démission du gouvernement Fillon. Rappelons que ce décret vise la réduction du recours obligatoire à l’architecte pour l’habitat individuel de plain-pied en instaurant un calcul spécifique de l’emprise au sol des bâtiments (emprise au sol constitutive de la surface de plancher). Outre le retrait de ce texte destiné à satisfaire le lobby des constructeurs de maisons individuelles, Lionel Carli demande désormais que le gouvernement revienne sur le seuil de dérogation au recours obligatoire à l’architecte. Ce seuil qui a été maintenu à 170 m2 dans le décret instaurant la surface de plancher fin 2011, doit être abaissé à 150 m2 selon lui. Il s’agit de compenser l’effet défavorable causé par le passage de la surface hors œuvre à la surface de plancher (surface dans œuvre). L’épaisseur des façades ne comptant plus, il est en effet, depuis le 1er mars dernier, possible de construire environ 10% de surface en plus sans architecte.
Qualité architecturale en deçà du seuil
Mais, toute ambition architecturale ne pouvant être abandonnée hors du recours obligatoire, le président de l’Ordre a évoqué avec la ministre quelques mesures qui amélioreraient la qualité en deçà du seuil : création d’une journée de conseil architectural gratuit (dispensé par les conseillers de l’Ordre) ; mise en place d’une mission architecturale forfaitaire pour l’habitat individuel (forfait permis de construire) ; allègement de la demande d’autorisation d’urbanisme pour les particuliers qui recourent à un architecte (la déclaration préalable au lieu du permis de construire) ; recours obligatoire sans dérogation possible dans certains périmètres tels que les Aires de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine (ex Zppaup). Naturellement, le rendez-vous qui n’avait pas pour seul but d’évoquer l’obligation de recourir à l’architecte a porté sur le manque de moyens des écoles d’architecture souligné en particulier par le collège des directeurs d’écoles d’architecture, mais aussi sur l’accompagnement de la profession par le ministère -via les Directions régionales des affaires culturelles (Drac)- dans la mise en place et le contrôle d’une véritable formation continue, ou encore sur la protection du patrimoine du 20e siècle pris notamment d’assaut par la réhabilitation thermique.
Guide sur le recours à l’architecte
Si Lionel Carli estime avoir été très écouté, aucun engagement concernant ces sujets n’a, à ce stade, été pris par la ministre. La profession qui attend beaucoup de sa tutelle veut également, selon le président de l’Ordre, « aider les élus » sur la manière de consulter les architectes. Ainsi, l’organisation des concours, la pratique de la procédure adaptée en marchés publics, l’évaluation de la mission de la maîtrise d’œuvre (pour notamment écarter les offres anormalement basses) font actuellement l’objet de l’élaboration par l’Ordre d’un guide en ligne, à leur attention. L’Association des maires de France (AMF), la Mission interministérielle pour la qualité des constructions publiques (Miqcp) et le ministère de la Culture, accepteraient d’héberger ce nouvel outil sur leurs sites Internet, dans quelques semaines.
Pour l’heure, la ministre aurait rassuré le président de l’Ordre. Prochain grand rendez-vous avec les architectes : le congrès annuel de l’Union nationale des syndicats d’architectes (25 au 27 octobre à Nice) : on n’y a pas vu de ministre depuis maintenant quelques années…
Aurélie Filippetti sera-t-elle la ministre des architectes ?