Article publié sur Actu.fr par Gil Martin, le 17 Jan 21 à 14:47
La liste DPA Occitanie veut réveiller un Ordre « engourdi ». Elle dévoile un programme de combat pour remettre l’architecture au cœur des débats. Et prévient : gare au GOU !
Les élections pour la gouvernance de l’Ordre des Architectes d’Occitanie sont lancées. Dans la course, la liste DPA (pour Défense Profession Architecte) qui a effectué, pour sa grande première nationale en 2013 lors des précédentes élections, une véritable percée, obtenant plusieurs sièges en Occitanie. Et cette année, la liste DPA entend bien remporter le sprint final.
« Reprendre toute notre place »
« Créé en 2008, DPA a été porté par des architectes lassés par l’immobilisme de l’Ordre, et animés par la volonté de redonner à l’architecte et à l’architecture toute sa place dans la société et le débat public », rappelle l’architecte frontignanais Christian Combes.
Une profession malmenée…
Le professionnel n’hésite pas à dire que sa profession est « malmenée », et que la qualité de l’architecture, pourtant déclarée d’intérêt public, « est menacée par la dégradation des conditions d’exercice ».
« L’architecture est malmenée, mais doit être défendue, et à travers elle l’intérêt général, et notamment celui des populations » _ Christian Combesarchitecte, candidat DPA
Les Héraultais s’engagent
« L’architecture doit être défendue, et à travers elle l’intérêt général, et notamment celui des populations », poursuivent les candidats DPA héraultais Maguelone Vidal (Montpellier) et Arnaud Dutrait (Villeneuve-les-Maguelone), qui ont décidé de s’engager aux côtés de Christian Combes, déjà élu en 2013 et qui repart pour un ultime mandat.
La volonté de « réveiller l’ordre »
Les colistiers héraultais (la liste DPA comprend des candidats de toute l’Occitanie) expliquent leur motivation commune : « Nous voulons réveiller l’Ordre dont le rôle est de défendre la création architecturale auprès du politique et de la population. Or, depuis longtemps maintenant, des décisions sont prises par l’Etat sans que la voix des architectes ne se fasse véritablement entendre », déplorent-ils.
« L’exclusion de plus en plus fréquente de l’architecte du suivi de chantier au profit de différents intervenants techniques doit cesser. La mission complète d’architecte doit être réhabilitée » _ Maguelone Vidal architecte, candidate DPA
DPA, seul contre la loi Elan
Les candidats régionaux prennent un exemple, celui de la loi Elan qui symbolise le lent abandon par l’Etat de la notion d’architecture d’intérêt public, et de l’obligation de proposer des projets qualitatifs pour créer un cadre de vie agréable : « DPA s’est prononcé clairement contre la loi ELAN, mais l’Ordre a tergiversé… Résultat : elle est passée, avec des conséquences lourdes pour l’urbanisme, l’architecture et les architectes ».
Loi ELAN : gare au GOU
DPA rappelle que dans le cadre de grands projets d’urbanisme, comme les ZAC, une ville doit aujourd’hui confier chaque réalisation prévue, logements ou équipements (écoles, piscine, bibliothèque, etc) à des architectes chargés de suivre leur projet de A à Z : « La présence de l’architecte est toujours obligatoire et garantit l’intérêt public », confirment les candidats régionaux : « Mais la loi Elan modifie la donne en instaurant les GOU (Grandes Opérations d’Urbanisme) qui changent les règles ».
Le privé, grand gagnant du GOU
« Désormais, avec les GOU, une collectivité peut confier la réalisation d’un quartier à un seul acteur, un constructeur national comme Bouygues, Vinci ou Eiffage qui aura l’envergure financière pour construire le quartier », explique Christian Combes : « Cette loi laisse la possibilité à un aménageur privé de tout faire, les logements comme les écoles, sans forcément confier à un architecte une mission complète… En fait, tout est donné au privé », analyse-t-il.
« DPA annonce la mise en ligne d’une plateforme gratuite des veilles techniques et juridiques à l’usage des architectes » _ Arnaud Dutrait architecte, candidat DPA
Vers des écoles Bouygues ?
Pourtant, les candidats DPA l’assurent : « L’obligation de faire appel à un architecte garantit la qualité et l’originalité d’un projet architectural », insiste Maguelone Vidal : Demain, nous aurons des écoles Bouygues, des bibliothèques Eiffage, des piscines ou des maisons pour tous Vinci… Avec les GOU, qui va défendre la qualité architecturale dans ces quartiers ? »
L’architecte, la garantie qualité-prix
DPA a aussi ciblé d’autres enjeux, comme le marché de la maison individuelle. Aujourd’hui, pour une maison de 150 (soit 90% du marché national), le particulier n’est pas obligé de prendre un architecte. « C’est une aberration, les particuliers optent pour des maisons de constructeurs sur catalogue », tonne Arnaud Dutrait : « Or, un projet réalisé par un architecte ne coute pas plus cher, et offre une garantie bien supérieure aux maisons sur catalogue ».
La maison individuelle dans le viseur
« Nous devons reconquérir une partie de ce marché », annoncent les candidats DPA qui estiment que ce combat sera salutaire pour la profession : « Il faut rendre obligatoire le recours à un architecte dès le premier m2… Pour nous, c’est un point fort du mandat », confirment-ils.
« L’Ordre doit défendre l’intégralité de nos compétences pour qu’elles cessent d’être mises sous tutelle à tous les niveaux »
Honoraires : revenir au référentiel et stopper le dumping entre architectes
Impossible, enfin, de ne pas évoquer un autre enjeu majeur : la renégociation des honoraires des architectes : « Avant, il existait un référentiel qui fixait les honoraires des archis par rapport à un projet (logements, école, piscine, etc..). Or, ce référentiel a disparu, entraînant une compétition effrénée entre les architectes et un effondrement des honoraires », rappelle Christian Combes.
La liste DPA n’accepte pas cet abaissement anormal des honoraires qui entraîne la profession vers le bas : « Il faut inverser la tendance, l’Ordre doit s’impliquer pour revenir à des niveaux de rémunération satisfaisants », tranche-t-elle : « Actuellement, c’est du grand n’importe quoi, on assiste à un véritable dumping entre architectes… Personne n’a rien à gagner à la précarisation d’une profession », concluent les candidats régionaux.
Repositionner l’archi auprès de l’élu
Enfin, la liste DPA évoque un autre enjeu, davantage lié à l’aménagement du territoire : le conseil auprès des élus, et notamment dans et autour des petites villes : « On compte 30 000 architectes en France, dont beaucoup dans les campagnes, les petites villes, l’arrière-pays… Ces archis connaissent bien leur territoire. De fait, l’un de des enjeux pour l’Ordre consiste à repositionner l’architecte auprès de l’élu, qui peut être un vrai conseiller pour l’aménagement urbain », explique Christian Combes.